
Le chant de Salomon de Toni Morrison
En mars, c’est Toni Morrison qui est à l’honneur des fantastiques classiques ! De cette autrice, j’ai déjà lu quelques romans : L’œil le plus bleu, Beloved, Un don ou encore Home. A chaque fois, j’ai ressenti cette même difficulté à poser des mots sur ma lecture [et je me suis débinée]. Mais cette fois, pas le choix : je dois vous parler de ce que j’ai pensé du Chant de Salomon sinon Moka va me faire son regard de « prof pas contente » [si, si ! ;)].
Résumé
Laitier est le fils de Macon Mort [alors, j’ai voulu l’appeler Macron tout au long de la rédaction de cette chronique, je ne sais ce que ça dit…], l’un des Noirs les plus influents de la ville, propriétaire de plusieurs immeubles à appartements et de la fille du premier médecin noir. Autant dire qu’il part avec certains avantages dont ne bénéficient pas la plupart des membres de sa communauté.
Néanmoins, Laitier peine à trouver sa place et son épanouissement : il a suivi la carrière que lui destinait son père, sa famille est clairement dysfonctionnelle et ses relations avec son plus proche ami se distendent. Il décide alors de prendre la route pour partir à la recherche d’un trésor et de la vérité sur son histoire familiale.
Ce que j’en ai pensé ?!
Au fond de cette poche où se cachait son cœur, il avait l’impression qu’on le manipulait. D’une certaine façon, tout le monde l’utilisait pour quelque chose ou comme quelque chose. Chacun mettait au point un projet à partir de lui, chacun faisait de lui l’objet de ses rêves de richesse, ou d’amour, ou de martyre.
Ce roman commence avec une scène assez marquante puis met ensuite pas mal de temps avant de vraiment démarrer. On suit Laitier de sa naissance jusqu’à la quarantaine. C’est un garçon très solitaire : douze ans le séparent de ses sœurs aînées, ce qui les empêchent de nouer une vraie relation ; la richesse ostentatoire de sa famille le rend suspect aux yeux des autres enfants du quartier, le plaçant le plus souvent comme bouc émissaire de ses camarades. Son enfance s’illumine lorsqu’il rencontre Guitare, un adolescent du Southside qui va le prendre sous son aile et devenir son meilleur ami.
Laitier et Guitare appartiennent à deux mondes totalement différents, ce qui va finir par les éloigner à l’âge adulte. Laitier n’a pas conscience de la plupart de ses privilèges d’homme riche, ni de l’exploitation que sa famille fait subir aux nombreux locataires qui habituent les immeubles de son père. Guitare, quant à lui, rejoint un mouvement ayant décidé de rendre aux Blancs, la violence qu’ils font subir aux Noirs, de manière relativement aléatoire. Il en parle à Laitier, mais celui-ci ne soutient pas son ami dans un projet qu’il trouve injuste et dangereux. Peu à peu, Guitare voit Laitier comme un ennemi de leur cause.
Par le biais de cette famille clairement dysfonctionnelle, Toni Morrison nous propose tout un panel de personnages secondaires de femmes noires, toutes plus ou moins empêchées de vivre une vie réellement épanouissante. Entre la mère de Laitier que son mari contraint à la chasteté, ses sœurs qui vivent encore comme des petites filles alors qu’elles sont adultes, sa cousine Reba qui ne vit que pour satisfaire les besoins de sa fille, Agar qui abandonne sa liberté pour se laisser dévorer par son amour pour Laitier, seule Pilates, sa tante, semble tirer son épingle du jeu. Orpheline, abandonnée par son frère Macon Mort au décès de leur père, elle tente de s’en sortir par ses propres moyens, vivant comme une nomade jusqu’à la naissance d’Agar. Elle subit de nombreux rejets, car elle ne possède pas de nombril, ce qui la fait apparaître comme une sorcière aux yeux de sa communauté. Comprenant cela, elle décide de ne compter que sur elle-même et de gagner sa vie comme bon lui semble et de s’éloigner des hommes… Pour moi, c’est le personnage le plus intéressant de ce roman, mais il est trop peu développé.
La seconde partie du roman se transforme en un road-trip pour retourner dans la région d’origine de Macon et Pilates Mort. Laitier finira par y découvrir la vérité sur son passé et comprendre la vraie valeur de l’existence.
J’ai trouvé qu’il y avait de nouveau beaucoup de longueurs dans ce roman, et de nombreuses circonvolutions. L’autrice m’a parfois perdue lorsqu’elle convoque les vieilles croyances pour combler les blancs de l’histoire familiale de Pilates et Laitier. J’avais hâte de connaître le dénouement mais je pense qu’on aurait vraiment pu trancher dans certaines parties, allègrement.
Encore une fois, Le Chant de Salomon témoigne des violences subies par la communauté afro-américaine et les conséquences de ces violences au sein de celle-ci. La langue de Toni Morrison est toujours aussi sublime, percutante et poétique. C’est un roman que je vous conseille si vous souhaitez approfondir votre connaissance de l’œuvre de Toni Morrison.
Infos pratiques
- Titre : Le chant de Salomon
- Autrice : Toni Morrison
- Traducteur : Jean Guiloineau
- Édition : 10/18, 1997
- Nombre de pages : 473pages
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4 commentaires
Madame lit
Pas lu ce livre mais c’est dommage «toutes ces longueurs». On décroche plus facilement.
Maghily
En même temps, j’ai envie de dire que c’est un peu le pacte de lecture avec Toni Morrison.
Il faut accepter de se laisser balader sans trop comprendre où on va, quitte à trouver cela parfois un peu long.
En général, ça vaut le coup 🙂
Violette
j’ai quand même l’impression que « perdu » est un mot qui revient dans tous les bilans concernant cette autrice… J’ai vraiment eu du mal avec Un don. Même pas sûre de relire l’autrice un jour :-/
Maghily
« Un don » n’était clairement pas mon préféré de l’autrice, parmi tous ceux que j’ai lus.
Mais oui, clairement, elle ne se laisse pas suivre si facilement !