Mes dernières lectures de 2024
Vous l’avez remarqué, la régularité ne fut pas mon fort en 2024. Avant de clôturer l’année, je voulais vous parler des dernières lectures que j’ai faites en décembre. Globalement, l’année littéraire se termine bien !
Trahir et venger de Laélia Véron et Karine Abiven
Vous l’avez peut-être déjà remarqué, j’ai une petite obsession pour les récits de celleux qui se disent « transfuges de classe ». Cela correspond à certains questionnements que je peux me poser concernant mon propre parcours, même si je ne me reconnais pas comme telle. C’est pourquoi, j’étais impatiente de découvrir l’ouvrage de Laélia Véron [dont j’admire le travail de manière générale] qui analyse les discours des transfuges.
Que puis-je vraiment retirer de cette lecture ? J’aurais tendance à dire : rien que je ne savais déjà, malheureusement. Tout d’abord, j’ai été assez déçue de constater que le corpus analysé comprenait quasi exclusivement les quelques figures françaises qu’on voit partout dès qu’il est question de transfuge : Annie Ernaux, Édouard Louis, Didier Eribon, Nicolas Mathieu et Rose-Marie Lagrave. D’autres sont aussi abordés, mais de manière beaucoup plus succincte.
Dans cet ouvrage, les autrices analysent les discours des transfuges, que ce soit à travers leurs œuvres littéraires ou d’autres médias (interviews, podcasts, publications sur les réseaux sociaux). Elles comparent ce qu’iels disent de leur parcours, selon les médias utilisés, les morales qu’on pourrait en retirer ainsi que le vocabulaire ou les structures propres à ces récits. Elles notent les nombreux points communs mais aussi les quelques divergences entre les auteurices ainsi que les incohérences présentes entre leurs propres discours et la manière dont iels transposent ces discours dans leurs œuvres littéraires.
Malgré ma petite déception, je ne peux que vous encourager à lire cet ouvrage si la question des transfuges de classe vous intéresse : il pourra vous aider à déconstruire et à remettre en question la figure du transfuge mais ne vous attendez à rien de révolutionnaire si c’est un sujet que vous avez vous-même déjà pas mal creusé. L’ouvrage contient quelques références intéressantes que je compte me procurer.
Trahir et venger, Laélia Véron et Karine Abiven, La Découverte, 2024, 230 pages
Circé de Madeline Miller
Noël approchant, je me suis dit qu’il était plus que temps de me pencher sur les cadeaux reçus lors des années précédentes : j’ai donc extirpé Circé de ma PAL. J’avais bien aimé Le Chant d’Achille, de Madeline Miller et j’étais donc curieuse de lire cette nouvelle réécriture d’un conte mythologique. Circé est une demi-déesse, fille d’Hélios, exilée sur une ile déserte lorsque les Dieux découvrent ce qu’elle est capable de faire, lorsqu’elle utilise les pouvoirs des plantes.
Circé, c’est l’histoire d’une solitude forcée qui en soi, avant déjà commencé lorsqu’elle vivait encore avec sa famille. C’est aussi la prise d’indépendance d’une femme qu’on a toujours rejetée parce qu’elle n’était « pas assez ». J’ai aimé suivre son évolution, sa prise de confiance, ses questionnements quant au sens de son existence, … Ce roman, c’est aussi une critique acerbe de la masculinité toxique et de la domination, une ode à la nature et à la vie simple. Globalement, j’ai aimé cette lecture même si je lui ai trouvé de nombreuses longueurs. Certes, une éternité de solitude, ça doit paraître long mais les lecteurs et lectrices n’ont pas la vie éternelle ! On y trouve tout ce qui fait le sel des récits mythologiques : la rivalité entre les Dieux, les grandes tragédies, des histoires d’amour plus ou moins toxiques et une petite touche de sororité.
Dans ce récit, il est aussi question de violences sexuelles, de vengeance [c’était un peu le leitmotiv de mon mois de décembre] et de maternité [ouais, ça non plus, visiblement, on peut jamais y couper !]. Des sujets qui peuvent apporter leur lot de traumas plus ou moins faciles à surmonter.
J’étais contente d’enfin lire ce roman qui me faisait de l’œil depuis longtemps mais cela vient confirmer que, de manière générale, je suis assez peu friande des histoires mythologiques.
Circé, Madeline Miller, Pocket 2019, 572 pages
Les Orageuses de Marcia Burnier
Plus tôt, cette année, j’avais lu Hors d’atteinte de Marcia Burnier que j’avais adoré ! Les Orageuses est son premier roman. Il raconte l’histoire d’une bande de filles qui décident de se venger des mecs qui les ont agressées sexuellement. Pour ce faire, elles organisent des expéditions punitives chez leurs agresseurs respectifs. Parallèlement à cela, on suit plus intimement certaines d’entre elles pour comprendre ce qui a été le déclencheur de leurs actions et les effets, sur leur propre santé mentale de leur reprise de pouvoir.
Les Orageuses, c’est un court roman coup de poing qui peut se lire en une ou deux soirées. Les chapitres sont courts, l’écriture fluide et chargée de cette colère qu’on garde trop souvent enfouie au fond de nous. C’est percutant mais aussi déstabilisant de voir des femmes choisir et assumer une certaine forme de violence. Mais c’est aussi terriblement exaltant [pour ne pas dire jouissif]. On tremble avec elles, on a envie de faire le guet pour les protéger d’un danger potentiel. Le seul reproche que je ferais à ce roman, c’est qu’il est parfois brouillon dans sa narration : j’avais parfois du mal à suivre les différentes trames narratives, à reconnecter la personne dont il était question avec son histoire. Mais malgré cela, j’ai envie de le faire lire à toutes les femmes de mon entourage : pour nous rappeler qu’on est fortes, puissantes et qu’un groupe de meufs, ça peut tout faire !
Les Orageuses, Marcia Burnier, Cambourakis 2021, 142 pages
Les voleurs d’innocence de Sarai Walker
Pour ma dernière lecture de l’année, j’ai choisi de sauter à pieds joints dans la sororité. Dans Les Voleurs d’innocence, Sarai Walker raconte l’histoire des six soeurs Chapel, dont la mère, Belinda, a toujours été qualifiée de folle par son mari et la société bien pensante de Bellflower. Or Belinda n’est pas plus folle que cela : elle a dû surmonter le traumatisme de grandir sans mère, la sienne étant morte en lui donnant naissance et elle ne supporte pas la vie de femme mariée et les contraintes que cette vie lui impose. Elle subit les assauts réguliers de son mari qu’elle déteste, dans cette maison hantée par les fantômes de toutes les personnes mortes sous les coups de feu des armes que fabrique la famille de son époux. Lorsque son aînée, Aster, lui annonce qu’elle va bientôt se marier, Belinda tente de la convaincre d’y renoncer ou « quelque chose d’horrible va arriver ». Évidemment, personne ne l’écoute, si ce n’est Iris, son avant-dernière fille. Quand la mort d’Aster survient au lendemain des noces, on crie à la sorcellerie. Mais rapidement, Iris constate que sa mère avait raison : chaque fois qu’une fille Chapel se marie, elle décède dans la foulée.
La narration de ce roman se fait au travers du personnages d’Iris, devenue Sylvia Wren à l’âge de 20 ans, une vieille dame artiste peintre renommée vivant quasi recluse au Nouveau Mexique [oui, on a la même ref en tête ! ;)]. Alors que Sylvia voit son passé la rattraper, elle décide d’écrire son histoire et celle de ses sœurs dans trois carnets bleus. C’est cette histoire que nous suivons sur les presque 600 pages de ce roman : celle des femmes des années 50, dans une Amérique qui ne voyait d’autre destin enviable pour elles que celui d’épouse dévouée et de mère, évoluant dans une jolie villa 4 façades en banlieue.
Iris/Sylvia raconte à la fois les tensions entre ses sœurs qui, malgré les signes, ne veulent pas renoncer aux promesses du mariage ; mais aussi les obstacles que rencontre toute femme qui voudrait vivre en dehors de ces carcans. Il est question de santé mentale, avec le traitement infligé à Belinda, de lesbianisme refoulé, de découverte du plaisir féminin ainsi que d’émancipation par l’art et l’éducation.
C’est un roman passionnant, qu’il est difficile de lâcher. Il contient de nombreuses références à des femmes artistes sur les destins et les œuvres desquelles j’ai envie de me pencher ! Une excellente manière de terminer mon année de lecture !
Les voleurs d’innocence, Sarai Walker, Gallmeister 2024, 592 pages
4 commentaires
Ping :
mespagesversicolores
Le Sarai Walker a eu l’air d’être une sacrée bonne pioche!
J’ai acheté Circé, je verrai si j’adhère 🙂
Maghily
Oui, il mérite d’être la coqueluche d’Instagram pour le moment ! 😉
J’ai vu que tu avais craqué pour Circé, j’espère que tu aimeras 🙂
Ping :