Les secrets de ma mère de Jessie Burton
De Jessie Burton, j’avais déjà beaucoup aimé The Miniaturist et The Muse. Avec Les secrets de ma mère, c’était la première fois que je la lisais en traduction. Le succès fut une nouvelle fois au rendez-vous.
Résumé
Londres, 1980. Élise est modèle dans une école d’art et n’a toujours aucune idée de ce qu’elle veut faire de sa vie. Elle rencontre Constance (Connie), une autrice à succès de quinze ans son aînée avec qui elle vit une histoire d’amour passionnée. Les deux femmes s’envolent pour la Californie où le dernier roman de Connie va être adapté au cinéma.
Londres, 2017. Rose a 35 ans et ne sait plus trop où elle en est : son couple bât de l’aile, elle se flétrit dans son job alimentaire et elle cherche toujours désespérément des infos sur sa mère qui l’a abandonnée alors qu’elle n’avait que quelques mois. Un jour, son père lui donne une nouvelle piste qui va l’amener à bouleverser son quotidien pour la suivre.
Ce que j’en ai pensé ?!
J’avais connu le bonheur – sauf que j’avais l’impression de pouvoir goûter le bonheur des autres bien plus intensément que le mien.
Jessie Burton est une spécialiste des romans à plusieurs temporalités : celui-ci n’échappe pas à la règle. Les deux histoires m’ont passionnées autant l’une que l’autre même si je me sentais bien plus proche de l’histoire de Rose [une meuf de 35 balais qui ne sait pas quoi faire de sa vie… Tu m’étonnes !]. Élise me tapait davantage sur les nerfs.
Pendant cette période, elles avaient passées trois jours à San Francisco et un week-end prolongé à Monterey qui avait inclus un détour par Salinas car Connie voulait voir où avait vécu Steinbeck.
Steinbeck forever 💙
Avec Élise et Connie, on suit l’histoire compliquée de deux femmes que tout oppose. Connie a des projets, de l’ambition et de l’argent. C’est elle qui détient le pouvoir dans le couple. Élise se laisse porter et semble n’avoir que sa beauté pour se démarquer. Elle se sent à la fois prisonnière de sa relation avec Connie et en même temps, elle n’a aucune envie d’y mettre fin. Elle voudrait surtout être le centre de l’univers de sa partenaire, ce qui n’est plus le cas depuis leur arrivée en Californie. Dans cette temporalité, il va être question de faux-semblants, de relations de couple pas loin d’être toxiques, d’adultère et de maternité avortée.
Dans l’univers de Rose, il est surtout question de quête de soi, d’amour hétéro qui périclite, de charge mentale et d’amour filial. Avec qui fait-on famille ? A-t-on vraiment besoin d’une mère pour devenir un être humain épanoui ? Pourquoi cherche-t-on davantage le parent absent qu’on ne profite de celui qui nous offre son soutien indéfectible au quotidien ? Il est aussi beaucoup question d’écriture : comment construit-on les personnages d’un roman ? Qu’est-ce qu’une autrice met d’elle-même dans ses textes ? Évidemment que ça me parlait ! Dans l’ensemble du roman, il y a aussi de nombreuses références littéraires, de jolis clins d’œil aux auteurs et autrices qu’aime Jessie Burton.
Autour de ces trois femmes gravitent toute une série de personnages qu’on retrouve parfois dans les deux temporalités et qui sont d’assez bonnes caricatures de leur époque : les acteurs narcissiques qui baignent dans les substances illicites, le petit ami incapable de gérer les sentiments, la meilleure pote star d’Instagram qui n’en peut plus de simuler la vie parfaite, …
J’ai trouvé ce roman assez décomplexant, rassurant. Il montre avec humour les difficultés auxquelles les femmes font face tout au long de leur vie : la sexualisation dès l’adolescence, le rôle de (future) mère assignée par la société, la culpabilité de ne pas parvenir à assumer ce rôle, les jeux pour préserver les apparences, la charge mentale dans le couple, etc. Le tout est décrit avec une petite pointe d’humour assez cynique [vous commencez à savoir que ça me plait], notamment par le biais de Rose qui fait preuve de beaucoup d’auto-dérision.
C’est également un roman à suspens : Rose va-t-elle retrouver sa mère ? Que va-t-elle choisir de devenir dans la vie ? Élise parviendra-t-elle à se libérer de l’emprise de Connie ? Cela vous tient en haleine même dans les moments plus creux.
J’ai passé un excellent moment de lecture avec ce roman, plus féministe que je ne l’avais imaginé au départ… Puis, j’ai réalisé que dans chacun des trois romans de l’autrice que j’ai lus, elle nous proposait des personnages féminins plus forts qu’il n’y paraissait, cherchant à s’émanciper. Jessie Burton fait donc désormais officiellement partie de mes autrices-chouchous dont je sais que les histoires vont me plaire !
Infos pratiques
- Titre : Les secrets de ma mère (The Confession)
- Autrice : Jessie Burton
- Traductrice : Laura Derajinski
- Édition : Folio, 2022
- Nombre de pages : 568 pages
- Genre : contemporain
2 commentaires
mespagesversicolores
Dis, tu me le passeras ?
Maghily
Tu as bien fait de me le rappeler, je l’ai glissé dans mon sac d’escalade pour ne plus l’oublier ! 🙂