Couverture de l'Amour et les forêts
Cinéma,  Culture,  Lecture

L’amour et les forêts d’Eric Reinhardt

L’envie était grande d’aller voir le film, réalisé par Valérie Donzelli, avec Virginie Efira qui est adapté de L’Amour et les forêts d’Eric Reinhardt. Mais avant cela, j’avais envie de lire ce roman, coincé au fond de ma wish-list depuis sa publication.

Résumé

Un écrivain ayant connu un joli succès avec son dernier roman raconte sa rencontre avec Bénédicte Ombredanne, l’une de ses lectrices. Cette dernière, agrégée de lettres modernes, lui avait envoyé une longue lettre dans laquelle elle lui disait tout le bien que lui avait procuré la lecture de ce roman. Lors de leur seconde rencontre, Bénédicte raconte à l’écrivain qu’elle vit une situation d’emprise avec son mari, dont elle tente de s’échapper. S’ensuit alors une correspondance assidue entre les deux protagonistes dont il est difficile de sortir indemne.

Ce que j’en ai pensé ?!

Pour être honnête, j’ai failli abandonner dès le premier chapitre [en ce moment, ma patience envers les choses qui m’ennuient est très limitée]. Dans celui-ci, l’écrivain-narrateur [alter égo de l’auteur ?] raconte sa rencontre avec Bénédicte et part dans de longues considérations sur sa condition d’écrivain. C’est assez pompeux et je trouvais qu’il se regardait un peu trop écrire.

Puis, on passe au récit de Bénédicte en tant que tel. Le ton change, revêt un caractère plus urgent. On découvre la vie de cette femme, son quotidien familial et, surtout, la relation malsaine qui la lie à son époux.

Dans L’Amour et les forêts, on découvre tous les mécanismes de l’emprise et leur caractère pervers. Bénédicte, bien que consciente de la manipulation opérée par son mari, ne parvient pas à s’en détacher. Ici, dans un premier temps, il n’est pas question de violences physiques : tout s’opère via les mots, les attitudes, le venin déversé petit à petit… On voit comment cet homme s’arrange pour isoler son épouse et faire en sorte de passer pour une victime aux yeux de certains de leurs proches. C’est terrifiant !

Dans le dernier tiers du roman, un autre personnage apparaît et l’on comprend d’autant mieux le cauchemar vécu par Bénédicte. On découvre tout ce qu’elle n’avait pas raconté. C’est glaçant.

Ce roman n’a pas été agréable à lire : l’ambiance qui s’en dégage nous prend à la gorge. Même les moments de “lumière” gardent un goût amer. C’est malsain, désespérant. Et ce malgré les passages où je me suis dit que ce que je lisais n’était pas crédible, qui auraient pu casser cette impression de malaise. Les dialogues entre époux, les scènes dans la forêt avec Christian, … C’était trop artificiel, à la limite de la caricature [ne parlons pas des dialogues Meetic ou Tinder, là c’était le pompon ! :D]. Et puis, quand le narrateur reprenait sa place dans le récit revenaient avec lui les passages trop pompeux à mon goût. J’en ai d’ailleurs sautés quelques-uns, ne voyant pas trop ce qu’ils apportaient au récit.

Je ne regrette pas, néanmoins, de l’avoir lu. Je n’avais encore jamais été plongée de cette manière dans une relation aussi toxique. Le roman soulève des questions importantes : le rôle que peuvent jouer les proches quand ils soupçonnent quelque chose, la dégradation des relations avec les enfants, les réactions du corps pour nous faire sortir de certaines situations. Cela décrit également très bien la somme des petites choses insignifiantes auxquelles le pervers demande de renoncer, ces petites choses qui forment un tout de plus en plus oppressant qui finit par enfermer la victime.

Je suis d’autant plus curieuse, maintenant, de voir comment Valérie Donzelli a adapté ce roman. Je sens que je vais passer une soirée compliquée le jour où je vais me décider à y aller mais je veux voir l’emprise à l’œuvre. Cette histoire, couplée au livre d’Ovidie lu en parallèle, ne m’aide pas à redorer mon image de la gente masculine mais que voulez-vous, ce sont les hasards heureux ou malheureux de nos choix de lecture !

Infos pratiques

  • Titre : L’amour et les forêts
  • Auteur : Eric Reinhardt
  • Édition : Folio, 2016
  • Nombre de pages : 402 pages

Et le film alors ?!

Vu qu’entre le moment où j’ai commencé à écrire cette chronique et le moment où je me décide à la publier, je suis allée voir le film : je vous donne un retour !

Si vous devez choisir entre les deux : allez voir le film ! Je l’ai trouvé beaucoup plus crédible que le roman [et c’est rare que ma préférence aille dans ce sens] : que ce soit au niveau des dialogues dans le couple ou du profil psychologique du personnage de Blanche [aka Bénédicte]. Le seul point que j’ai préféré dans le livre, c’est la rencontre avec son (futur) mari, qui, dans le film m’a semblé un poil trop “facile” [la meuf est traumatisée de l’amour et elle succombe aussi vite au premier beau parleur qui passe ?! Allez !].

Il s’agit véritablement d’une adaptation : les grandes lignes restent les mêmes mais beaucoup de choses diffèrent. Par exemple, pas question de rencontre avec l’écrivain-narrateur ici : Blanche raconte son histoire à une femme dont on découvre l’identité en fin de film. Là aussi, cela m’a semblé bien plus crédible. L’ensemble de la narration est plus fluide et, je ne sais pas expliquer exactement par quoi et comment, mais on sent que l’histoire a été réécrite d’un point de vue féminin [déjà, les scènes de sexe sont nettement moins crues]. Et cette fin ! Bref, j’ai été remuée par ce film : l’angoisse m’a prise à la gorge plusieurs fois, j’avais envie d’insulter le mari de manière régulière et j’ai mis tout le trajet de retour pour reprendre mes esprits. Petit conseil : allez le voir avec un ou une compagne/compagnon. Un peu de soutien en sortie de visionnage ne fera pas de mal aux plus sensibles 😉

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