Méfiez-vous des femmes qui marchent
Lecture

Méfiez-vous des femmes qui marchent d’Annabel Abbs

J’étais tombée par hasard sur Méfiez-vous des femmes qui marchent, d’Annabel Abbs au détour d’un rayonnage de librairie sans me décider à l’acheter. Finalement, c’est le garçon aux oiseaux qui a eu l’heureuse idée de me l’offrir pour Noël [il me connaissait finalement mieux qu’il ne le laissait présager…]. Au même titre que Les femmes aussi sont du voyage, de Lucie Azema, cet essai a fait office de détonateur…

Résumé

L’autrice a choisi de se pencher sur les destins de 5 femmes artistes qui ont accordé une très grande place à la marche dans leur vie. Il s’agit de Nan Sheperd, Gwen John, Clara Vyvyan, Simone de Beauvoir et Georgia O’Keefe. Pour ce faire, Annabel Abbs s’est lancée dans leurs pas, refaisant les plus célèbres de leurs randonnées. C’est l’occasion pour elle de réfléchir sur son propre rapport à la marche et pour nous décrire les magnifiques paysages foulés par nos femmes-artistes.

Ce que j’en ai pensé ?!

La fille qui marche seule dit avec son corps
Que le monde vaut bien un tel risque

The Girl Who Goes Alone – Elizabeth Austen

Au départ, j’étais un peu sceptique face à ce texte : je trouvais que l’autrice prenait beaucoup de place dans le récit qu’elle avait choisi de nous conter et l’alternance entre le présent et la vie des artistes me rendait la lecture confuse. Puis, sans doute était-ce le temps que je me place moi aussi dans ses pas, la lecture s’est faite plus fluide et la magie a opéré.

Dans cet ouvrage, j’ai découvert des artistes que je ne connaissais pas, pour la plupart, ou alors que de noms [hormis Simone de B., évidemment]. Je connaissais vaguement Georgia O’Keefe suite à l’exposition qui a eu lieu à Paris, l’an dernier, sur son œuvre et Daphné du Maurier, qui accompagne Clara Vyvyan dans ses escapades. C’était donc déjà particulièrement intéressant de découvrir l’existence de ces femmes et leur travail [ma liste d’œuvres à lire ou à explorer a encore augmenté]. Pour chacune, l’autrice retrace leur carrière artistique et décrit la manière dont elles ont intégré la marche à leur vie, quelle influence celle-ci a eu sur leurs œuvres mais aussi sur leur manière d’appréhender le monde, etc.

Grâce au grand art et au savoir-faire de leur prose, aussi bien Simone de Beauvoir que Nan Sheperd nous apprennent à transformer nos corps en source sensuelle de liberté et de délices, elles nous apprennent à vivre à travers nos corps. Mais elles nous rappellent aussi nos attaches avec le monde vivant – notre habitat commun. Elles nous enseignent le moyen de devenir, mais aussi d’appartenir.

A ces récit s’ajoutent les réflexions de l’autrice sur les difficultés auxquelles les femmes qui désirent voyager seules sont confrontées : le jugement de la société, le rejet, les agressions, etc. L’autrice s’appuient sur de nombreux ouvrages historiques pour retracer l’histoire des femmes et de la marche et, ainsi, nous prouver que de tous temps, les femmes ont pratiqué cette activité [et longtemps pour leur survie, plus que comme un loisir ou un sport]. C’est l’instauration de la sédentarité, puis ensuite, de la société patriarcale telle qu’on la connait aujourd’hui qui ont peu à peu limité leurs possibilités, les confinant à l’espace réduit du foyer.

A plusieurs reprises, l’autrice aborde aussi la question des violences [domestiques, conjugales ou sexuelles] auxquelles les femmes voyageuses ont dû faire face. Elle rappelle ainsi que c’est plus souvent au sein de son foyer qu’une femme risque de se faire violenter, plutôt que lors d’une de ses échappées [surtout à notre époque] mais que c’est pourtant davantage les agressions de randonneuses qui sont mises en avant dans les médias et qui participent à instaurer notre peur de partir à l’aventure.

Au lieu de laisser la peur nous dominer, nous devons prendre conscience des réalités et continuer d’avancer, en reconquérant la campagne et la nature sauvage pour nous-mêmes, nos filles, nos petites-filles et nos arrières-petites-filles.

L’autrice compare aussi la situation de ces femmes avec celles des hommes, qui ont souvent davantage écrit sur leurs voyages : ce que chacun ose partager, à quelles difficultés ils font face, etc. On voit alors que les situations sont très différentes !

C’était donc dense, passionnant et surtout, ça m’a donné l’envie folle de reprendre mes chaussures de randonnée et de partir à l’aventure ! Je ne peux donc que vous conseiller de vous lancer dans cette lecture si le sujet du voyage au féminin vous intéresse ou si, vous aussi, vous aimeriez vous lancer ! Je suis sûre que cela pourrait vous donner quelques idées d’escapades !

Infos pratiques

  • Titre : Méfiez-vous des femmes qui marchent
  • Autrice : Annabel Abbs
  • Traductrice : Béatrice Vierne
  • Édition : Arthaud, 2021
  • Nombre de pages : 434 pages
  • Genre : essai, littérature de voyage

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