Mémoires d’Hadrien de Marguerite Yourcenar
En mars, c’était combat de Marguerite(s) chez les fantastiques classiques puisqu’il fallait lire soit du Marguerite Duras, soit du Marguerite Yourcenar. Ayant déjà lu L’Amant deux fois, j’avais envie de commencer mes lectures du mois avec Mémoires d’Hadrien de Yourcenar, que je n’ai encore jamais lue.
[Bon, en vrai, j’avais commencé avec un Duras dont je ne parlerais pas ici].
Résumé
Mémoires d’Hadrien est la biographie romancée de l’Empereur Hadrien qui a régné sur Rome de 117 à 138. Le roman est écrit sous forme d’une lettre adressée à Marc Aurèle, qui sera l’un de ses successeurs. Hadrien lui raconte sa vie depuis son entrée dans la vie politique et militaire, jusqu’à sa mort.
Ce que j’en ai pensé ?!
Ce roman de Marguerite Yourcenar est l’un de ses plus connus et est souvent qualifié de chef d’œuvre, ce que je comprends tout à fait. L’autrice a fait un énorme travail de recherche pour rendre compte de la vie de l’empereur et écrit cette lettre dans une langue très travaillée qui nous donne vraiment l’impression de remonter le temps.
Le véritable lieu de naissance est celui où l’on a porté pour la première fois un coup d’œil intelligent sur soi-même : mes premières patries ont été des livres.
Pour ma part, ce ne fut pas une lecture évidente car ce n’est pas spécialement une époque qui me passionne. De plus, la fatigue de ce mois pauvre en sommeil m’a freinée dans ma compréhension du livre. Le style est si travaillé, certaines réflexions tellement profondes que je devais parfois revenir en arrière pour vraiment comprendre ce que je venais de lire.
Mon intérêt pour le contenu de la lettre fut inégal : j’ai adoré la première partie dans laquelle Hadrien fait le point sur tous les plaisirs auxquels sa santé déclinante l’oblige à renoncer. Cela donne place à de sublimes réflexions. J’ai été moins emballée par ses récits de guerre et de querelles politiques.
Déjà certaines portions de ma vie ressemblent aux salles dégarnies d’un palais trop vaste, qu’un propriétaire appauvri renonce à occuper tout entier.
Ensuite, une grande part du livre s’attarde sur sa relation particulière avec un jeune homme, relation que j’ai trouvée problématique à bien des égards [cela m’a beaucoup fait penser à ce que j’avais lu dans Le Mythe de la virilité d’Olivia Gazalé]. Mais ne vous en dis pas plus, je trouve que c’est intéressant de la découvrir durant la lecture. Ensuite, Hadrien revient sur la manière dont il a vécu après la fin de cette relation, jusqu’à l’approche de sa propre mort.
Parfois, à de très rares intervalles, une faible lueur palpitait froidement à l’horizon de mon ciel ; elle n’embellissait ni le monde, ni moi-même : je continuais à me sentir plus détérioré que sauvé.
Tout au long du roman, j’ai été frappée par la beauté de certaines phrases, touchée par cet homme puissant et ses réactions lorsqu’il doit fait face à la perte de personnes qui lui sont chères. Il accorde une grande place à l’amitié dans sa vie : il a d’ailleurs une très belle relation avec Plotine, l’impératrice mariée à Trajan, son prédécesseur. A travers cette lettre, on découvre un homme très érudit, qui voulait consolider un État dans lequel règnerait la paix, conscient que l’expansion à outrance ne mènerait à rien de bon. Les pensées que lui prête Yourcenar avaient beau être terriblement ancrées dans son époque, cela semblait aussi extrêmement actuel : certaines de ses décisions pourraient encore être prises aujourd’hui.
A la fin de l’ouvrage, l’autrice a également fourni un carnet de notes dans lequel elle raconte la conception de cet ouvrage foisonnant. J’avoue ne pas encore l’avoir lu [ce sera pour une période où mon cerveau sera plus reposé et réceptif]. En tous cas, je me suis totalement laissée prendre par cette lettre : pendant toute ma lecture, j’avais vraiment l’impression de lire les mots d’Hadrien.
Ce fut donc une lecture ardue mais extrêmement belle, qui signe mon entrée [mais sûrement pas ma sortie] dans l’univers de Marguerite Yourcenar. Si vous connaissez bien l’autrice, n’hésitez pas à me conseiller d’autres de ses romans.
17 commentaires
mespagesversicolores
J’ai exactement le même ressenti que toi. Des phrases et des passages qui m’ont énormément plu et d’autres m’ont un peu ennuyée.
Je suis heureuse d’avoir renoué avec Youyou
Maghily
Après, je savais que je prenais un risque en choisissant un roman qui se passait durant l’Antiquité [cf. Flaubert] et j’ai finalement été agréablement surprise.
Curieuse de lire d’autres romans d’elle car elle écrit tellement bien <3 !
Mumu dans le bocage
Découverte également pour moi de cette écrivaine et je lui reconnais beaucoup de qualités mais j’ai eu beaucoup de mal par moments à me concentrer et à garder le fil….. Oui je n’en ai pas parlé dans ma chronique mais tu as raison sur la relation avec Antinoüs…. J’ai été interpellé par certains détails ! 🙂
Natiora
Je l’ai lu il y a un bon moment et j’avais adoré. Mais c’est vrai, ce n’est pas une lecture facile et il faut avoir le cerveau disponible.
Maghily
Oui, je pense que je l’aurais encore plus apprécié si je l’avais lu dans d’autres conditions. 🙂
Maghily
Cela me rassure un peu de voir que je ne suis pas la seule à avoir eu des difficultés de concentration.
Je n’ai pas encore eu l’occasion de lire vos chroniques mais je suis curieuse de lire les ressentis de chacune.
Je ne dirais que “L’Enfant”… 😉
L'ourse bibliophile
Vous commencez à me donner envie de le lire, ce fameux roman ! Je n’étais pas intéressée par Yourcenar, mais je pense que je lui laisserai un jour une chance. Un jour où je me sentirai prête pour les réflexions profondes et philosophiques d’Hadrien ! Merci d’avoir si bien partagé ton ressenti sur cette lecture !
Maghily
Merci ! 🙂
Le tout, c’est de se jeter à l’eau (et de choisir un moment où tu n’es pas trop fatiguée).
Je ne regrette pas de l’avoir lu : j’aurais juste préféré un meilleur timing.
L'ourse bibliophile
C’est bien l’impression que j’ai. Avoir du temps et la disponibilité mentale pour ce roman. Ce ne sera pas tout de suite, mais un jour, oui.
mesechappeeslivresques
Les avis semblent souvent partagés sur cette lecture, j’aimerais tenter de découvrir sa plume mais le côté exigeant de sa prose me refroidit un peu.
Maghily
Ce n’est peut-être pas le premier livre à lire d’elle alors (sauf si tu adores la période).
Mais je crois vraiment que la découverte vaut le détour 🙂
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Mokamilla
C’est ce roman que j’aurais aimé lire pour le défi. La faute à la grippe et les jours de folle vie. Ta chronique me donne clairement envie d’y aller, aussi ardue soit la lecture.
Maghily
Ce sera pour un autre moment, plus propice.
J’espère que tu as repris des forces et que cette vilaine grippe est derrière toi 🙂
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